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Communiquer pour s'accaparer les ressources d’un territoire


Dans les forêts tropicales d’Amérique centrale, le singe hurleur à manteau émet par intermittence ses cris puissants, qui s’entendent à plusieurs kilomètres à la ronde. – © Wollertz/AdobeStock

La densité d’une espèce animale sur une zone donnée dépend souvent des ressources alimentaires disponibles. Quand celles‑ci sont très disséminées, les individus, ou les groupes, ont également tendance à se disperser, et à tenter de s’accaparer un territoire duquel ils chassent tout autre congénère afin de se réserver ces ressources.

La conquête, le marquage et la défense d’un territoire entraînent une communication parfois très complexe.

Le marquage olfactif chez les mammifères
La plupart des mammifères territoriaux déposent des marques odorantes en des points déterminés autour du territoire, servant en quelque sorte de bornes-frontières. Il peut s’agir selon les espèces de sécrétions de diverses glandes, de déjections ou d’urine.
Par exemple, les antilopes comme le grand koudou (Tragelaphus strepsiceros) utilisent les sécrétions de glandes situées près des yeux en frottant leur tête sur les buissons et les hautes herbes. Le tenrec (Echinops telfairi), une sorte de hérisson endémique de Madagascar, dépose de la salive sur l’endroit à marquer, dont il renforce l’odeur en y ajoutant celle de son corps, se grattant alternativement le flanc avec sa patte avant de la frotter dans la salive. Les galagos (Galago ssp.), petits primates arboricoles d’Afrique, urinent sur la paume de leurs mains et s’en enduisent ensuite la plante des pieds. En grimpant aux arbres, ils laissent derrière eux des traces odorantes.

Mâle de grand koudou frottant les glandes de sa tête sur un monticule de terre pour marquer son territoire. – © Nick Dale/Adobe Stock

Le marquage sonore du territoire
Certaines espèces émettent des cris pour revendiquer la possession d’un territoire. Les loups vivent en meute, qui n’a pas de taille fixe, mais dépasse rarement une trentaine d’individus, sur un territoire suffisamment vaste pour nourrir ses membres, de l’ordre de plusieurs centaines de kilomètres carrés. Ils en marquent les limites avec leur urine, leurs crottes, des grattages au sol ou sur les troncs. Mais sur des espaces aussi vastes, ces bornes sont distantes et ne peuvent être rafraîchies rapidement. Aussi utilisent-ils pour se signaler aux meutes voisines des hurlements qui portent loin.
Les sons s’évanouissant très vite, contrairement aux odeurs, ces cris doivent être répétés régulièrement pour conserver leur efficacité. Les singes hurleurs (Alouatta ssp.) de la forêt amazonienne vivent en groupes familiaux conduits par un mâle dominant. À l’aube et au crépuscule, plus rarement dans la journée, se déroulent alors de bruyants concerts de hurlements tonitruants, très impressionnants, s’entendant de très loin. Les singes hurleurs montrent ainsi leur force et délimitent leur territoire par rapport aux groupes voisins.

Chanter plutôt que se battre
Les espèces territoriales de passereaux utilisent leurs chants pour régler les conflits de frontières. Deux chanteurs, parfois plus, peuvent s’affronter pour définir les limites d’un territoire, ou pour la possession du territoire lui‑même. Le concert assourdissant qui retentit au petit matin au printemps, au début de la saison de reproduction, témoigne de l’entrain de nombreux passereaux chanteurs dans cette compétition exacerbée.
En général, la structure du chant est innée, mais les jeunes oiseaux apprennent les moindres variations de leur répertoire spécifique en écoutant les adultes, et s’exercent à la production de notes complexes avant de fixer leurs chants au début de l’âge adulte. Ce sont surtout les mâles qui chantent pour s’approprier un territoire et attirer les femelles, mais celles‑ci ont également besoin d’une période d’apprentissage pour reconnaître les chants de leur espèce. Les chants transmettent de nombreuses informations aux congénères. Les mâles rivaux en tirent des informations sur la capacité de combat et l’expérience du chanteur.
Le chant est plutôt un duo qu’un concert solo. Les séquences chantées sont relativement courtes, séparées par des intervalles de silence pour écouter les réponses des voisins. La durée des chants, leur force, l’endroit où se tiennent les chanteurs permettent à chacun d’évaluer la motivation de l’autre, et de négocier ainsi l’emplacement des frontières. Plus un chant est long, plus il est répété rapidement, plus il est fort, plus la motivation du chanteur est importante. Le voisin peut alors lâcher prise et admettre ainsi tacitement que cette zone fait partie du territoire du chanteur. Inversement, un chant plus court, plus faible, répété moins souvent face à un voisin plus bruyant, équivaut à lui reconnaître la primauté.

Cet extrait est issu de l'ouvrage :

Les secrets de la communication animale
Les secrets de la communication animale

Si vous lisez ces lignes, c’est que nous sommes en train de communiquer ! Tous les êtres vivants le font, de la « simple » bactérie aux plus grands mammifères marins. C’est nécessaire pour trouver un(e) partenaire, se protéger, se procurer de la nourriture, ou même se coordonner dans des tâches collectives.

Au cours de l’évolution, les animaux ont développé divers systèmes de communication adaptés à leur environnement, utilisant les odeurs, les sons, le toucher, les couleurs, et même les ondes électriques. Des organes spécialisés leur permettent de percevoir ou de produire des messages ciblés, comme les antennes des papillons, sensibles aux phéromones des femelles de leur espèce. La communication entre espèces existe aussi, notamment entre certains oiseaux et des singes, qui décodent leurs cris d’alerte signalant avec précision un prédateur commun. Encore plus étonnant, pour se débarrasser d’un herbivore, les plantes peuvent sécréter des composés qui mobilisent des animaux prédateurs ou parasites de l’agresseur.

Connaissez-vous le langage des couleurs, employé par de nombreuses espèces pour séduire ou repousser ? Ce livre vous parlera également de stratégies, la communication animale n’étant pas exempte de tromperies, comme les flashs lumineux envoyés par des lucioles femelles pour dévorer des mâles d’espèces proches, ou émis par des poissons abyssaux pour capturer des proies. Richement illustré, cet ouvrage fait l’éclatante démonstration que l’échange d’informations complexes n’est pas le propre de l’humain.

Il s’adresse aussi bien aux naturalistes éclairés qu’au grand public curieux.

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