Les drones s’immiscent peu à peu dans le domaine de l’agriculture de précision et viennent compléter le travail des satellites.

Tous ceux qui pensent en hectares, agriculteurs en tête, ont compris depuis bien longtemps que prendre de la hauteur pouvait leur simplifier le travail ou leur fournir de précieux renseignements. Avions, hélicoptères, satellites et désormais drones font partie des outils de l’agriculteur aux côtés du tracteur ou de la moissonneuse, surtout s’il est à la tête de grandes cultures céréalières. La surveillance est devenue le lot commun de ces techno-agriculteurs tant pour le respect des directives européennes que pour le contrôle des récoltes lorsqu’ils ont souscrit des assurances. Ils sont aussi habitués à être surveillés par satellite : les versions successives de Spot contrôlent ainsi les surfaces agricoles et renseignent Bruxelles pour attribuer les subventions selon les surfaces cultivées, les pâtures des moutons, etc., ou vérifier la bonne application des directives comme celle sur le nitrate1.

Plus récemment, le satellite a aussi fait ses preuves pour surveiller rendement, vigueur (développement foliaire) ou état sanitaire (besoins en engrais, stress hydrique) des grandes cultures comme le blé, le maïs, l’orge ou le colza. De quoi limiter les apports en engrais, produits phytosanitaires et eau. Tant mieux pour nos assiettes et la planète. On estime qu’environ la moitié des agriculteurs français modulent leurs apports en engrais (avec ou sans ces données satellite). En France, c’est Farmstar2 qui assure ce service, une application numérique lancée en 2003 à laquelle 13 000 agriculteurs sont abonnés (soit800 000 ha de blé, colza et orge, près de 10 % des surfaces de céréales cultivées). Farmstar leur fournit des cartes indiquant, avec une résolution jusqu’à 1,50 m, quels engrais épandre, en quelle quantité et à quel endroit. Ce qu’on appelle l’agriculture de précision. Les données peuvent même être directement transmises au logiciel de distributeur d’engrais du tracteur qui s’exécute et régule son débit d’apport azoté3.

Et les satellites n’ont pas dit leur dernier mot. Ils s’améliorent sans cesse (avec les satellites Pléiades, la résolution passe à 70 cm) et le prix des images continue à diminuer. Les nouvelles constellations de microsatellites (de quelques dizaines de kilos, mis en orbite entre 250 et 500 km) ou nanosatellites (comme les CubeSat de moins de 10 kg) devraient poursuivre dans cette voie avec des fréquences de passage qui pourraient être quotidiennes (les satellites ne repassent au même endroit qu’au bout de plusieurs jours, or en envoyant des dizaines de petits satellites coordonnés une fréquence quotidienne devient possible) et des résolutions de l’ordre du mètre (mais un traitement des données plus délicat car ils sont plus instables). Toutefois, gros ou petits, les satellites seront toujours pénalisés par les nuages et autres plafonds bas.

Des drones commencent à compléter cette vision grand angle avec des applications plus terre à terre, mais non moins utiles, en grande partie les mêmes que les satellites. En France, l’agriculture compte pour 5 % dans les usages de drones (19 % aux États-Unis). L’altitude maximum de vol (150 m en France) et la distance maximale au télépilote (1 km) leur permettent de couvrir une fauchée de l’ordre de 300 m (c’est le terme, cela représente la largeur de la surface où les données sont acquises), une surface bien moindre que celle des satellites (de plusieurs kilomètres) mais complémentaire. En plus des mesures prises au sol, cette surveillance à tous les étages pourrait, finalement, être bénéfique pour tous. Si les agriculteurs exploitent ces données.

1Il s’agit de vérifier la mise en place de cultures intermédiaires « piège à nitrates » pour éviter que les premiers traitement au printemps ne soient lessivés et rejoignent les nappes phréatiques.
2Farmstar a été développé par Arvalis et Airbus Defense and Space.
3En 2014, 5% des parcelles utilisaient ce service pour la fertilisation (CVT AllEnvi, mars 2016).

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