Une reine entourée de sa cour, composée de jeunes ouvrières lui tapotant le corps avec leurs antennes pour sentir ses phéromones.©HeinzWaldukat/Adobe Stock
L’abeille mellifère vit en société. Les membres de la colonie partagent un même nid, ou ils coopèrent, communiquent et apportent des soins à leur progéniture. Des rôles et des tâches sont répartis entre les individus. Une femelle, la reine, est spécialisée dans la reproduction, et devrait être appelée plus justement « la mère ». Les autres femelles sont stériles tant qu’elle est présente et mènent de nombreuses missions à peu près suivant leur âge. Comme la société de l’abeille mellifère est extrêmement organisée, nous avons tendance à penser que la reine dirige la ruche, d’autant qu’il y a bien des mâles, mais pas de roi. La reine s’identifie à son large thorax et à son abdomen plus développé et distendu. Elle est dépourvue de corbeille à pollen et de glandes cirières. Son rôle est de pondre. Elle vit plusieurs années, alors qu’une ouvrière ne vit que quelques semaines en été, jusqu’à 6 mois pour la génération d’hiver.
Les signes de sa présence ne trompent pas, et l’apiculteur les connait très bien : la colonie est calme, il y a du couvain sain, compact, à tous les stades de développement, des œufs aux nymphes en passant par les larves. Le statut de la reine s’appuie sur un arsenal chimique, à savoir les phéromones qu’elle émet en permanence. Ces molécules assurent la cohésion dans la société et incitent les ouvrières à lui prodiguer des soins. Ces phéromones donnent à la colonie son identité et stimulent l’activité des ouvrières. La reine vit au cœur du nid et n’en sort pas, sauf au début de sa vie pour s’accoupler, et éventuellement lors de l’essaimage, quand une partie de la colonie émigre pour trouver un nouveau site de nidification.
La reine dirige-t-elle la colonie ? Elle joue un rôle dans son organisation par sa ponte plus ou moins importante et par les phéromones qu’elle secrète constamment. Mais ce rôle est purement passif, non intentionnel. Les ouvrières, elles, prennent en charge les tâches quotidiennes indispensables : soin et nourriture de la reine et du couvain, chauffage ou climatisation du cœur du nid, apport de nectar, de pollen, d’eau, de propolis, élaboration du miel et défense de la colonie. Pour ce faire, elles communiquent par des sons, des vibrations, des odeurs, des danses. Elles organisent également la succession de la reine sans aucune initiative de sa part, nourrissant, dans des cellules plus grandes, avec de la gelée royale durant tout leur développement, quelques larves d’ouvrières qui donneront des femelles fertiles. Aussi peut-on dire que la ruche est une démocratie consensuelle auto-organisée. Elle ressemble à un super organisme sans chef qui naît, se développe, vit, parfois longtemps, et meurt.



