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Élargir la palette consommable des légumes


La domestication du chou sauvage a donné naissance à de très nombreuses variétés aux formes et aux couleurs variées. - AGB Photo Library / Adobe Stock

Pour rendre comestibles les légumes sauvages toxiques, et élargir ainsi son répertoire alimentaire, l’homme a mis en œuvre trois techniques principales : la cuisson, la transformation des aliments bruts et la domestication des espèces sauvages.

 
L’un des nombreux bénéfices de la cuisson réside dans le fait qu’elle inactive ou détruit la plupart des substances toxiques. L’homme a maîtrisé le feu il y a 400 000 ans environ, mais l’utilisation épisodique de braises formées à la suite d’un incendie naturel est beaucoup plus ancienne.
Outre la cuisson, nos ancêtres préhistoriques ont mis au point (bien sûr de façon totalement empirique) d’autres procédés de détoxification des légumes comme, par exemple, l’immersion prolongée dans l’eau (pour lessiver les substances toxiques) ou la fermentation qui, dans le cas de la choucroute par exemple, permet d’éliminer les glucosinolates du chou. Sur les hauts plateaux andins, un autre procédé de détoxification est l’exposition des pommes de terre à l’alternance du froid nocturne et de la chaleur diurne. Dans d’autres cas (manioc amer), l’homme a eu recours à une combinaison de plusieurs procédés.
La domestication des légumes sauvages a été la troisième technique qui a permis d’aboutir, après de patients efforts de sélection opérés par l’homme, à des espèces et variétés ne présentant plus (ou peu) de toxicité. À l’échelle de l’histoire de l’humanité, la pratique de l’agriculture est un processus extrêmement récent : il a été initié au Proche-Orient (avec le blé, l’orge, les pois chiches…) il y a seulement 11 000 à 12 000 ans, alors que, rappelons-le, les premiers représentants du genre Homo sont apparus il y a 2,4 (voire 2,8) millions d’années. S’agissant des légumes, la pauvreté des restes archéologiques rend souvent difficile la détermination précise de l’époque et du lieu où ces végétaux ont été domestiqués. En règle générale, pour les légumes comme pour les autres plantes alimentaires, la domestication a eu lieu dans la (les) zone(s) où l’espèce sauvage « ancêtre » était naturellement présente. Il faut noter qu’un même légume a pu être domestiqué de façon totalement indépendante, à des époques et dans des lieux différents. Ce fut le cas, par exemple, du haricot qui a été domestiqué à la fois dans les Andes et en Amérique centrale. Ou de la calebasse (ou gourde) sauvage qui, probablement, a été mise en culture sur trois continents différents : l’Amérique du Sud (entre 11 000 et 9 000 ans avant notre ère), l’Asie (Thaïlande, entre 10 000 et 6 000 ans av. J.-C.) et l’Afrique (Égypte, vers 2000 av. J.-C).

Si les courges sont originaires du seul continent américain, les gourdes sauvages qui leur ressemblent étaient également présentes en Asie et en Afrique. - © SNEHIT PHOTO /Adobe Stock

Outre leur détoxification, la sélection artificielle des légumes avait pour objectif de modifier d’autres caractéristiques de l’aliment sauvage. On sait, par exemple, que la sélection naturelle de la pomme de terre sauvage favorise la propagation des tubercules dans l’espace : ces derniers demeurent très petits mais ils naissent à l’extrémité de longs stolons (tiges souterraines) permettant à la plante de coloniser le maximum d’espace disponible. Pour répondre à leurs besoins, les hommes ont plutôt cherché à obtenir de gros tubercules et des stolons courts afin de faciliter la récolte. L’activité de « sélection » opérée par l’homme devenu cultivateur a également permis d’obtenir, à partir d’une plante sauvage présente sur tout le littoral d’Europe du Nord, la grande variété de choux que nous connaissons aujourd’hui. Et de créer, à partir des tout petits fruits de leur ancêtre sauvage, des tomates cultivées 100 fois plus grosses ! On pourrait également citer l’obtention, à partir de la même espèce spontanée, de légumes d’aspect aussi différent que la bette et la betterave, ou que le céleri-rave et le céleri-branche. Rappelons enfin que les carottes sont devenues orange par la seule volonté humaine… Jusqu’au milieu du XIXe siècle, toutes ces « créations » horticoles ont été réalisées dans l’ignorance la plus totale des lois de la génétique et de l’évolution (dont les premiers initiateurs furent, dans la seconde partie du XIXe siècle, l’industriel et artiste nancéien Émile Gallé et le moine autrichien Gregor Mendel).

 

Cet extrait est issu de l'ouvrage :

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