À l’état sauvage, le cacaoyer adulte mesure une dizaine de mètres. C’est peu,comparé aux trente, quarante, cinquante mètres des grands arbres de la forêtéquatoriale. Le cacaoyer est un « arbre de l’ombre », lui qui vit toujours dans lapénombre moite des géants équatoriaux. Sous cet ombrage, les cacaoyers sontprotégés de la sécheresse et des variations de température.

Les cacaoyers plein soleil
Cependant, au cours du XXe siècle, les agronomes du cacao constatent que lescacaoyers plantés en plein soleil produisent davantage. Ils proposent ce choix deculture aux producteurs, mais très vite apparaissent des inconvénients. Denombreux insectes attaquent les cacaoyers, les maladies fongiques s’intensifientet les terres s’appauvrissent plus rapidement. Il faut donc augmenter les traitementsphytosanitaires et ajouter des engrais. Tout ceci demande beaucoup detechnicité à des planteurs dont les moyensfinanciers ne peuvent subvenir aux nouveauxbesoins. De plus, avec le recul, il apparaît que ladurée de vie des cacaoyers est nettement pluscourte. Mais la préoccupation principale estd’ordre écologique. Dans la forêt équatoriale, lesarbres absorbent de grandes quantités de gazcarbonique, produisent de l’oxygène à foison etfavorisent le développement de microclimatshumides qui combattent la sécheresse et leréchauffementclimatique. Les arbres d’ombragedes cacaoyers jouent un rôle un peu identique.Dans la culture en plein soleil, tout le bénéficedes arbres d’ombrage est perdu et les cacaoyerspeuvent même se retrouver dans des zonesdevenues trop sèches pour eux.

La forêt protectrice
En culture, pour vivre mieux et plus longtemps, le cacaoyer doit donc pousser àl’ombre de grands arbres, laissés ou plantés là pour le protéger du soleil direct.Pour de tout jeunes cacaoyers, un ombrage provisoire de bananiers peut suffire.En attendant les premières cabosses, la vente des bananes fournira au planteur unrevenu apprécié. Mais ensuite, il faudra viser plus haut, avec de grands arbres dela famille des légumineuses (Érythrine, Albizzia, Gliricidia…). Aimables grandsarbres qui aident la production du cacao ! Dans leurs ramures, là-haut, à quaranteou cinquante mètres du sol, toute une flore et une faune extravagante vit, pousse,grouille, vole et se développe. Sans le savoir, grâce à ses arbres protecteurs, lecacao participe au maintien de biotopes intéressant l’écologie, la médecine et lapharmacopée : mousses et lichens, plantes et fleurs, insectes et papillons rares,petits animaux arboricoles, oiseaux migrateurs… Mais encore plus important,les arbres d’ombrage interceptent beaucoup de radiations solaires, ce qui ralentitle réchauffement au sol. En Amérique latine, les planteurs sont tellementpersuadés des bienfaits de ses grands arbres qu’ils les appellent madre del cacao. La « mère du cacao » qui veille et protège ses enfants.

L’agroforesterie :des arbres au milieu des cultures
Pendant tout le XXe siècle, l’augmentation de la production de cacao a ainsi étéobtenue par l’extension des surfaces cultivées au détriment de la forêt primaire etpar l’installation de cacaoyères en plein soleil. Cette déforestation massive aentraîné une perte de la fertilité des sols, une diminution de la biodiversité et unplus faible stockage du carbone par l’élimination des grands arbres équatoriaux.L’agroforesterie peut être une solution à cette situation. C’est une techniqueagricole qui permet de réduire la déforestation en associant des arbres auxcultures, voire même à l’élevage.
Dans les cacaoyères, l’agroforesterie entraîne une meilleure protection des sols etde leur fertilité, permet d’y réguler le microclimat, réduit la prolifération desinsectes et des maladies, favorise la croissance des cacaoyers et lutte contre leréchauffement climatique.
Des parcelles agroforestières qui font cohabiter 190 arbres fruitiers et forestiersavec 1 500 cacaoyers par hectare (densité similaire à celle de la monoculture enplein soleil) produisent jusqu’à 750 kilos de cacao marchand par hectare, avecpour seul engrais l’humus issu des arbres. C’est plus qu’une cacaoyère en pleinsoleil sans engrais.
De surcroît, la capacité de stockage du carbone de ces parcelles peut atteindre75 tonnes de gaz carbonique par hectare, alors que les cacaoyers de monocultureen plein soleil ne stockent que 10 tonnes de CO2 par hectare.
Aujourd’hui, les grandes firmes chocolatières ont bien compris l’avantage d’associerdes arbres fruitiers et forestiers aux cacaoyers et elles investissent dans desprogrammes d’agroforesterie dans tous les pays producteurs de cacao.Le cacaoyer en plein soleil, c’est du passé.

 

Comment faire pousser un cacaoyer chez soi ?
Si vous avez une graine de cacao, juste sortie de la cabosse fraîche (sonpouvoir germinatif ne dure guère plus d’un jour), débarrassez-la bien detoute la pulpe qui l’entoure. S’il en restait, elle moisirait et empêcherait lagermination. Plantez ensuite la graine de cacao à environ un centimètre deprofondeur, à plat, dans du terreau. Si vous avez une jeune branchette decacaoyer, vous pouvez faire une bouture. Mettez-la à raciner dans de l’eau,puis introduisez-la dans du terreau. Quand la plantule apparaît, gardez-lasoigneusement dans un lieu ombragé, chaud et humide.
Sachez cependant que sous nos climats, les chances de succès sont trèsminces, même en pot. Toute l’année, il lui faudrait 25 à 30 °C et 80 %d’humidité relative de l’air. Avec un tel régime, les humains vont déserterle logis ! J’en connais toutefois qui ont réussi à garder un cacaoyer pendantplus de cinq années, dans leur salle de bains. Un exploit ! Même sous serre,ce n’est pas facile. Les cacaoyers poussent, mais ils ne font pas de fruit.

Cet extrait est issu de l'ouvrage :