En plus des signaux acoustiques destinés au prédateur,de nombreux oiseaux jouent de parades visuelles remarquableslorsqu’ils détectent une menace. Les plusconnues de ces manifestations sont elles aussi clairementdestinées au prédateur, qu’elles semblent viser àattirer, distraire ou effrayer
Distraction
Les premières mises en scène antiprédateurs quiviennent à l’esprit sont peut-être les simulations d’ailesbrisées. L’oiseau feint d’être blessé en courant sur le solde manière maladroite et exagérée, souvent les ailesdéployées et inclinées sur le côté. Après avoir attiré leurattention, le parent oiseau tente alors d’éloigner lesprédateurs des oeufs ou des jeunes vulnérables. Cessimulations sont pratiquées par de nombreuses espèces,en particulier les oiseaux de rivage, mais aussi les tétras,les engoulevents et les passereaux.
Bien que ces mises en scène soient trèsrépandues, elles ne sont pas toujours très efficaces.Si la sélection a fortement agi sur l’émetteur (le parentoiseau) en vue de tromper le prédateur, cette mêmesélection peut également agir fortement sur le récepteur (le prédateur) pour lui éviter d’être trompé. Enobservant les parades de diversion des tétras contre lesrenards, on a pu constater que ces derniers les ignorentparfois pour se mettre à chercher des oisillons àproximité immédiate. Le renard comprend que la paradede diversion ne livre aucune information sur la présenced’un adulte blessé, mais qu’elle trahit bien plusprécisément la présence d’oisillons vulnérables àproximité. Tout comme les cris de détresse, les paradesde diversion ne fonctionnent qu’avec les prédateurs lesplus naïfs.
Tromperie
Pour répondre aux menaces des prédateurs, denombreux oiseaux se livrent à une transformationfrappante : ils hérissent leurs plumes, déploient leursailes et sifflent ou claquent du bec. Ce type de communicationest généralement assimilé à du bluff : l’oiseau sefait alors passer pour beaucoup plus grand qu’il n’est,jusqu’à parfois dissuader un prédateur. Notons que cetype de démonstration menaçante est courant chez lesgrands oiseaux comme les chouettes, qui disposent d’unvéritable arsenal pour se défendre et soutenir un bluff.Ces manifestations peuvent même viser à effrayer, enparticulier chez les oiseaux comme le caurale soleil, quidéploie ses ailes pour révéler des plumes colorées, danslesquelles on voit des ocelles.
Chez certains oiseaux plus petits, la parademenaçante semble basée sur le mimétisme. Les picsd’Eurasie et d’Afrique, les torcols, sont connus pour lestorsions de leur cou. Lorsqu’ils sont dérangés dans leurnid ou capturés par un ornithologue, ils balancent leurtête et sifflent à la manière d’un serpent. Le prédateurqui inspecterait une des cavités sombres d’un arbredans lesquelles ces oiseaux nichent pourrait facilementcroire avoir rencontré un serpent et se retirer. D’autresoiseaux nichant dans des cavités, comme les mésanges,se livrent à des imitations similaires, faites demouvements ondulants, de sifflements, et même decoups de bec et d’ailes sur les parois. Même pour unchercheur qui sait pertinemment que ces sons sontproduits par une mésange et non un serpent, l’imitationpeut être assez surprenante et intimidante.
Parades dissuasives de poursuite
Les postures menaçantes décrites ci-dessus s’appuientsur la surprise et la tromperie. C’est le contraire d’uneautre catégorie de parades antiprédateurs, souventappelée parade dissuasive pour les prédateurs ou lespoursuivants, qui repose, elle, sur les informations fiablesqu’elle transmet. Ces parades dissuasives de poursuitesont un peu plus mystérieuses que les parades dediversion ou de menace, car le fait qu’elles soientdestinées à un prédateur n’est pas toujours très clair.Il faut des observations minutieuses et répétées pourconfirmer que la parade a lieu principalement enprésence de prédateurs. Et même lorsque c’est confirmé,il faut s’assurer que le signal n’est pas simplement destiné à informer des congénères de la présence du prédateur.
Les motmots sont bien connus pour leurs longuesqueues en forme de raquette. Ces queues s’assimilent àune forme de signal ornemental et peuvent être agitéesvivement comme des balanciers. Comme elles sontprésentes chez les deux sexes, on peut supposer qu’ellesne servent pas à attirer la femelle, du moins pas selon leschéma typique. Au fil des ans, de nombreux observateursont remarqué que les motmots maintiennent généralementleur queue immobile et qu’ils commencent à l’agiter àl’approche d’un humain. D’autres observations plus finesont montré que ce mouvement n’intervenait qu’enprésence de prédateurs, indépendamment de la présenced’autres motmots, tels que des partenaires. Ce qui suggèreque ce signal est bien destiné au prédateur. On pense queles signaux dissuasifs de poursuite fonctionnent principalementen informant le prédateur qu’il a été repéré, que laproie potentielle est en alerte, et donc que le facteursurprise n’existe pas. Ce signal pourrait être aussi un signalhonnête de qualité. À l’instar des parades sexuelles quipeuvent indiquer à une femelle la forme physique du mâle,ce signal peut informer le prédateur que sa proie potentielleest en bonne condition et qu’elle a beaucoup dechances de s’échapper.
On pense qu’une poignée d’autres espècesd’oiseaux ont recours à des parades dissuasives depoursuite. La plupart ont pour point commun de reposersur l’agitation de la queue ou la couleur vive des ailes,de la crête ou de la queue.
Cet extrait est issu de l'ouvrage :